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Aphrodite
Ô Déesse en nos bras si tendre et si petite,
Déesse au coeur de chair, plus faible encor que nous,
Aphrodite par qui toute Ève est Aphrodite
Et se fait adorer d'un homme à ses genoux,
Toi seule tu survis après le crépuscule
Des grands Olympiens submergés par la nuit.
Tout un monde a croulé sur le tombeau d'Hercule,
Ô Beauté! Tu reviens du passé qui s'enfuit.
Telle que tu naquis dans la lumière hellène
Tu soulèves la mer, tu rougis l'églantier,
L'univers tournoyant s'enivre à ton haleine
Et le sein d'une enfant te recueille en entier.
Telle que tu naquis des sens de Praxitèle
Toute amante est divine, et je doute, à ses yeux,
Si le Ciel te fait femme ou la fait immortelle,
Si tu descends vers l'homme ou renais pour les Dieux.
Pierre Louÿs
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Vers les yeux des sirènes
Qu'on déserte la ville! Que nul rallume
L'autel! Nous laisserons à tout jamais, ce soir,
Les dieux horribles de la terre, et dans le noir
Nous partirons, suivis par un frisson d'écume...
La nef impérieuse à travers l'amertume
Bondira, tranchant l'eau du fil de son coupoir
Et nous nous pencherons sur la proue, à l'espoir
De vos terribles voix, déesses de la brume!
Grands poissons glauques d'où fleurissent des corps blancs,
Nus miroirs de la lune et des flots nonchalants,
Vous qui chantez vos yeux dans les algues, Sirènes!
Quand nous aurons touché vos bouches, vous pourrez,
D'un signe seulement de vos doigts adorés,
Délivrer dans la mort nos âmes plus sereines.
Pierre Louÿs
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